La croissance passe par la Pologne

Nétur

Pour se tailler une place dans les chaînes d’approvisionnement, les PME québécoises doivent désormais aller se placer au plus près des donneurs d’ouvrage. C’est le cas de Nétur, PME de Longueuil spécialisée dans l’usinage de composantes de moteurs à réaction, qui a ouvert en janvier un bureau à Rzeszów, dans le sud de la Pologne. Avec des ambitions affichées.

Chez Nétur, le maximum est fait pour améliorer la compétitivité de cette entreprise d’une cinquantaine d’employés. Quand la firme a déménagé en 2012, tous les déplacements d’opérateur ont été optimisés. « On n’est pas la PME 4.0, mais on est à peu près à 2.8, sourit Stéphane Turcotte, vice-président de Nétur, dans une allusion à l’usine du futur. Habituellement, une entreprise fait 150 000 $ de revenus par employé, nous sommes au double. »

L’eldorado polonais

Pour autant, Nétur doit affronter une concurrence permanente. Au Québec, M. Turcotte dénombre cinq entreprises ayant le même profil que la PME de l’arrondissement de Saint-Hubert. Et d’autres concurrents ne sont pas loin, en Nouvelle-Angleterre. « Avant, on était diversifiés, mais nous nous sommes centrés sur l’aéromoteur, indique Stéphane Turcotte. C’est un marché de niche, exigeant, qui demande de performer… mais qui est plus propice pour nous à long terme. »

Parmi ses clients, Nétur compte de grands acteurs de l’aérospatiale, comme Pratt & Whitney Canada, United Technologies (UTC), General Electric, Safran… Or, ces quatre clients sont actifs dans la région de Rzeszów, zone dans laquelle Nétur réalise déjà 10 % de son chiffre d’affaires. « Le sud de la Pologne est un gros pôle de l’aéromoteur, explique Stéphane Turcotte. L’Europe de l’Est a une main-d’œuvre très habile de ses mains, forte en génie mécanique. » Et ces talents se paient moins cher qu’en Amérique du Nord. « Là-bas, un agent de méthodes coûte 2000 $ par mois, contre le triple ici », précise M. Turcotte.

Un effort nécessaire

En 2012, Pratt & Whitney Canada invite Nétur à aller voir ce qui se fait en Pologne. « À l’époque, ouvrir un bureau à l’étranger me paraissait un défi immense », se rappelle Stéphane Turcotte. Mais la raison l’emporte. « Si on reste sur nos clients au Québec, on manque des opportunités, assure-t-il. Oui, c’est compliqué d’aller se placer à l’étranger, mais à moyen terme, c’est juste bénéfique. »

Cinq ans plus tard, à Rzeszów, Nétur est en train d’embaucher une équipe de quatre à six personnes, essentiellement des agents de méthodes et des agents commerciaux. « C’est important d’avoir des gens sur place pour interpréter les plans et pour communiquer dans la même langue », souligne Stéphane Turcotte. Le décalage horaire sera aussi mis à profit. Comme les employés travailleront de 8 h à 17 h de chaque côté de l’océan, le travail commencé en Pologne pourra être achevé à Montréal, alors que la journée de travail sera finie en Europe. « Ce décalage de six heures allongera notre journée de travail », se félicite M. Turcotte.

Aidée par l’Europe ?

À moyen terme, Nétur envisage de produire en Pologne, peut-être en commençant par l’impression 3D avant de passer d’ici cinq ans à une fabrication locale. Rendu là, Nétur compte même bénéficier d’aides de l’Union européenne. « Après un an de présence sur place, nous pourrons demander des aides européennes », affirme M. Turcotte. Les fonds de l’Union européenne pourraient alors financer jusqu’à 60 % de chaque investissement, pour des projets de 2 à 3 millions d’euros (entre 2,7 et 4,2 millions de dollars), envisage le vice-président de Nétur.

Cette production polonaise ne prendra pas le travail réalisé à Saint-Hubert, assure M. Turcotte. « Ce bureau en Pologne nous aide à supporter nos opérations à Montréal, en contribuant à notre croissance », précise-t-il.

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